Manger, se régénérer

Par Patrick DE VIVIES, directeur de la MDF

« Que ton aliment soit ta seule médecine »
Citation attribuée à HIPPOCRATE, père de la médecine

Manger, se régénérer

Régénération

Le corps des êtres vivants est en renouvellement permanent, de la naissance jusqu’à la mort. Pratiquement toutes nos cellules (à quelques exceptions près*) se régénèrent, à une fréquence plus ou moins élevée en fonction des cellules. De quelques jours (cellules tapissant la surface de l'intestin, cellule de la rétine) à quelques semaines (cellule de peau), à quelques mois (globule rouge) à quelques années (cellule de foie ou de poumon), voire à une décennie (cellule des os), notre corps est presqu’intégralement renouvelé tous les dix à quinze ans. Ainsi, une personne de 50 ans a pratiquement refait son foie une cinquantaine de fois.

Cette régénération se réalise à partir d’éléments, de molécules, que nous prélevons dans l’environnement en respirant, en buvant ou en mangeant. En simplifiant un peu, on peut dire que « nous sommes ce que nous mangeons**.» Car le corps ne peut correctement se régénérer s’il n’a pas les éléments nécessaires et indispensables pour ce faire. Le choix de notre alimentation, en qualité comme en quantité, est donc un déterminant fondamental de notre bien-être et de la capacité de notre organisme à trouver son équilibre.

* Certains neurones, les ovocytes par exemple ne peuvent se régénérer.
** Nous sommes ce que nous mangeons, Dr Jane Goodall 2008

Si les molécules qui nous composent se renouvellent autant, en quoi sommes-nous constants ?

Les muscles, les os, les cheveux, les ongles, la peau...sont fabriqués grâce aux protéines, qui sont  des molécules biologiques géantes (ou macro molécules) présentes dans toutes les cellules vivantes. Elles sont formées d'une ou de plusieurs chaînes de molécules. Elles sont fabriquées par notre organisme à partir de «briques élémentaires », les acides aminés, en suivant l’information contenue dans nos gènes, c’est-à-dire qu’elles sont codées par notre ADN.* Et c'est par leur intermédiaire et leurs nombreuses fonctions (structure, transport, régulation, signalisation, réception, stockage, défense, etc.) que notre génome contrôle la constance de l’organisation, de la structure et des réactions biochimiques de nos cellules. Les protéines sont donc essentielles à la vie. 

Sur les 500 acides aminés que connaît le monde vivant, une vingtaine seulement entre dans la composition des protéines de toutes les cellules vivantes. Certains de ces acides aminés servant à la fabrication des protéines, neuf au total, ne peuvent être synthétisés par le corps. Il est donc indispensable de les trouver dans notre alimentation.

Protéines animales ou végétales ?

Les aliments d'origine animale sont généralement plus riches en protéines que ceux d'origine végétale. Aussi, des aliments tels que la viande, le poisson, les œufs ou le fromage sont particulièrement riches en protéines. Cependant, il est possible d’avoir suffisamment de protéines dans son alimentation sans consommer des protéines animales. De même que les protéines végétales peuvent fournir suffisamment d'acides aminés essentiels et non essentiels, pourvu que les sources de protéines alimentaires soient variées et que l'apport calorique soit suffisamment élevé pour répondre aux besoins énergétiques (sans qu'il soit nécessaire de les combiner dans un même repas). Les principaux aliments végétaux sources de protéines sont les graines oléagineuses (amandes, pistaches, lin...) et autres légumineuses (pois chiches, haricots, lentilles...).

Enfin, notre organisme ne réutilise pas tel quel les protéines produites par des animaux ou de végétaux qu’il trouve dans notre alimentation. Au cours de la digestion, les protéines sont désagrégées pour fournir les fameuses «briques élémentaires », les acides aminés, qui serviront à nos cellules pour produire les protéines codées selon nos gènes. Il est donc indispensable d’apporter à notre corps les protéines nécessaires (et notamment les acides aminés essentiels) dont il a besoin.

* https://www.sciencesetavenir.fr/fondamental/biologie-cellulaire/le-proteome-humain-reserve-quelques-surprises_37917

La vie sur Terre est probablement née d’un mélange d’eau et de graisse* au contact d’énergie (éclair, chaleur volcanique ou solaire). La plupart des lipides ou corps gras a cette capacité essentielle de ne pas être soluble dans l’eau. Les lipides entrent donc dans la composition des molécules de la membrane cellulaire, leurs propriétés hydrophobes permettant de séparer l’eau à l’intérieur de l’eau et à l’extérieur des cellules. La graisse a donc été indispensable à la naissance de la vie en permettant au vivant de se séparer de son environnement et de filtrer sélectivement ce qui peut y entrer (les nutriments) et ce qui peut en sortir (les excréments). 

3,5 milliards d’années après la naissance de la première cellule vivante, nos organismes humains composés de cent mille milliards de cellules, sont tout aussi dépendants des lipides, qui constituent la matière grasse des êtres vivants. Leur propriété hydrophobe est à la base des mécanismes du vivant, permettant la formation de structures biologiques, cellules, organites, délimitées par des membranes constituées principalement de lipides. Les lipides assurent par ailleurs diverses autres fonctions biologiques, notamment de stockage de l'énergie, de transport de certaines protéines et hormones dans le sang, de véhicules pour les vitamines solubles dans les graisses ; elles participent en outre à certaines de nos hormones essentielles, comme les hormones sexuelles**.

Il est par conséquent primordial de ne pas bannir les corps gras de notre alimentation, mais au contraire de veiller à recevoir un apport suffisant en graisses, et surtout, en graisses de qualité***.

* Pr Marc Henry, L’eau et et la Physique quantique
** Anatomie et physiologie humaine, Marieb-Hoehn
*** https://www.nutriting.com/comprendre-la-nutrition/la-nutrition-en-7-lecons/les-lipides/

La plupart des écosystèmes fonctionnent grâce à l’énergie du soleil*. Les êtres humains et les animaux ne font pas exception, mais contrairement aux végétaux, ils ne peuvent se nourrir directement de la lumière du soleil. Les plantes ont en effet la capacité, par photosynthèse, de convertir l’énergie lumineuse en énergie chimique emmagasinée principalement dans les sucres (glucose) mais aussi dans d’autres molécules complexes. Nous sommes donc dépendants des plantes que nous mangeons pour nous approvisionner en énergie solaire.

Aussi, il n’est pas étonnant qu’à part le sucre du lait (le lactose) et les quantités négligeables de celui présent dans les viandes (le glycogène), tous les glucides que nous ingérons sont d’origine végétale. Les sucres proviennent des fruits, de la canne à sucre et de la betterave à sucre, du miel et du lait ; l’amidon est un sucre composé (polysaccharides) qui se trouve dans les céréales et les légumineuses. Les fibres sont aussi des sucres composés qui sont abondants dans de nombreux végétaux qui bien qu’ils ne soient pas digérés, favorisent la digestion.

Les glucides constituent donc la principale source d'énergie de notre organisme. La concentration de sucre dans le sang doit être maintenue à un niveau constant pour alimenter notre corps en énergie : notre cerveau notamment en dépend intégralement. Si le sucre est indispensable, il ne faut pas en abuser : or, dans l’alimentation moderne, l’apport en sucre dépasse très largement, beaucoup trop largement, les besoins de notre organisme, qui converti ces glucides en trop et stocke les excédents sous forme de gras, favorisant le surpoids et l’obésité.

* Biologie Hartman

Le choix de notre alimentation, en qualité comme en quantité, est donc un déterminant fondamental de notre bien-être et de la capacité de notre organisme à trouver son équilibre. Or, pour faire face à l’augmentation de la population mondiale, l’industrie alimentaire et la grande distribution ont été incités à produire à moindre coût des quantités croissantes de produits alimentaires. Cela a été trop souvent réalisé au détriment de la qualité nutritive des produits de grande consommation.
De ce fait, les étals des supermarchés sont largement dotés en produits transformés, raffinés, vidés de leurs nutriments et gavés d’additifs, de sucres, de gras transformés. Les produits agricoles et l’eau sont très contaminés par des pesticides, herbicides et engrais chimiques, et les animaux élevés en batterie sont gavés aux hormones, aux antibiotiques et aux tranquillisants.

En quantité & en qualité

Notre assiette doit être équilibrée quantitativement, c’est-à-dire que notre ration alimentaire doit contenir une proportion suffisante de nutriments essentiels majeurs comme les glucides, les lipides et les protéines, mais aussi apporter les vitamines et les minéraux essentiels au maintien de notre équilibre. Nous parlerons donc dans cette rubrique de ces nutriments et de la part que chacun d’entre eux doit occuper dans notre alimentation quotidienne.

Notre assiette doit aussi être équilibrée qualitativement, car si nous avons besoin de sucre, un sucre industriel transformé et raffiné n’a pas la même valeur nutritive qu’un sucre produit naturellement par un fruit. Et le fruit n’aura pas la même valeur nutritive s’il a poussé aux engrais et aux pesticides, a été récolté et emballé vert, ou s’il a muri sur l’arbre au soleil et qu’il est mangé tout juste cueilli !

Aujourd’hui, les preuves scientifiques s’accumulent pour souligner que notre alimentation n’est plus adaptée à notre organisme : au quotidien, nous mangeons trop de sucre, trop de viande, trop de laitages, trop de céréales raffinées, trop d’additifs alimentaires et de produits porteurs de carences. La vie est porteuse de vitalité : chaque jour, rajoutons dans nos assiettes plus d’aliments vivants (une crudité à chaque repas, des jus de légumes faits maison), plus d’aliments de qualité (labels biologiques ou raisonnés, produits locaux ou de voisinage). Apprenons à cuisiner et à consommer les « super aliments » disponibles à notre portée.

La manière de manger, elle-même, est importante. Nous avons trop souvent perdu l’habitude de prendre le temps de manger, dans un moment de détente, notamment le midi en semaine. Il est si important de mastiquer lentement les aliments, d’être attentif au goût et à la texture de ceux-ci.

Car la digestion commence dans la bouche : lors de la mastication, l’aliment est réduit et imprégné de salive. Cette salive, produite en grande quantité, ramollit la nourriture et grâce aux enzymes qu’elle contient engage les transformations chimiques qui vont décomposer les aliments en molécules nutritives assimilables par notre organisme. En mangeant vite, on digère mal, et on prend plus facilement du poids. A contrario, plus on prend le soin de mastiquer et moins on aura besoin de manger pour être rassasié !

En effet, la sensation de satiété, c’est-à-dire le sentiment de ne plus avoir faim, arrive au bout de quinze à vingt minutes après l'ingestion. Manger vite signifie donc souvent manger au-delà des besoins de notre corps et se préparer à des troubles digestifs divers (brûlure dans l'estomac, remontées acides, flatulences, etc…). Combien de fois avez-vous mangé juste parce qu’il est l’heure de manger sans ressentir la faim ?

La manière de cuisiner les aliments a également de l’importance. La cuisson engendre un grand nombre de molécules complexes n’existant pas à l’état naturel. Il est démontré que certains éléments mutagènes issus de cuissons à haute température (grillades et fritures notamment) sont peu recommandables car elles sont toxiques et peuvent favoriser la survenue de cancers*. Il est donc préférable de privilégier les crudités ou la cuisson douce à température modérée.

* Dr Jean Seignalet, L’alimentation ou la troisième médecine, 2012

 

Le repas devrait être un moment de plaisir, un temps de partage consacré aux saveurs et aux odeurs, dans l’éveil de nos sens. Un temps qui s’intègre harmonieusement dans le cycle de nos journées, dans l’alternance de l’action et du repos, de l’alimentation et du jeûne, dans le respect de nos rythmes biologiques.

Les études scientifiques confirment l’intérêt d'un régime basé sur des prises alimentaires régulières et séparées dans le temps par rapport à un régime alimentaire basé sur du grignotage, de façon anarchique, en continu, tout au long de la journée*. Ainsi, la régularité des repas serait plus importante que le nombre de calories ingérées dans la prise de poids.

L’harmonie de notre cycle biologique doit nous amener à veiller à la régularité de ce qui rentre comme de ce qui sort de notre corps. En clair, être attentif à avoir un transit intestinal régulier et des urines abondantes. Il est recommandé d’éliminer chaque jour, voire plusieurs fois par jour, et dans tous les cas a minima quatre à cinq fois par semaine.

* https://www.sciencesetavenir.fr/nutrition/la-regularite-des-repas-plus-importante-que-le-nombre-de-calories-ingerees_28668

Après la digestion, qui dure environ huit heures, tout ce qui n'est pas absorbé poursuit sa progression dans le côlon pour former les selles. Ce qui doit être éliminé est toxique pour notre organisme et plus cela séjourne durablement dans notre tube digestif, plus est grand le risque que cela finisse par traverser la paroi intestinale qui peut devenir perméable, ce qui est la porte d'entrée de nombreuses pathologies. Il faut environ 18 à 24h après un repas pour que ce qui a été consommé soit éliminé. La constipation est un problème sérieux et très répandu qui est trop souvent pris à la légère.

L’intestin est étroitement lié au cerveau. Ces deux organes communiquent constamment par des voies biochimiques. Le stress peut influencer la santé de notre intestin en modifiant ses sécrétions gastriques, sa perméabilité, sa sensibilité et le flux sanguin des muqueuses. Non seulement le stress peut affecter la fonction physiologique de l’intestin, mais il peut également modifier la composition de notre flore intestinale et augmenter les risques de développer une prolifération bactérienne intestinale, et donc une constipation.

La flore intestinale jour un rôle essentiel dans notre cycle digestif et notamment dans les mécanismes de défenses immunitaires qui nous permettent de combattre les agressions extérieures.
La flore intestinale, c’est un biotope intérieur, un microbiome comme l’appelle les spécialistes, de plus de 100 000 milliards de bactéries vivant dans nos intestins, 2 kg d’organismes vivants — plus de 500 espèces différentes — installées dans différentes niches écologiques le long de notre tube digestif*. Il n’existe pas de bonnes ou de mauvaises bactéries vivant dans l’intestin : seul l’équilibre entre les colonies installées peut assurer un fonctionnement optimal.

En contrepartie des bons et loyaux services qu’elles rendent à notre corps, ces bactéries attendent de nous que nous les nourrissions. Là encore, la qualité de notre alimentation est déterminante, un apport en fibres suffisant étant indispensable. Une nouvelle étude montre que lorsque les bactéries du système digestif n’obtiennent pas la quantité suffisante de fibres à partir de l’alimentation, elles peuvent commencer à « grignoter » la couche de mucus qui entoure l’intestin jusqu’à un point critique où les bactéries nuisibles peuvent infecter la paroi du colon**.

*Le grand livre des probiotiques et des prébiotiques, Danièle Festy, juin 2014

** https://www.lanutrition.fr/les-news/les-fibres-previennent-les-infections-en-nourrissant-nos-bacteries-intestinales

Notre bien-être est donc étroitement lié à notre alimentation. Nous sommes ce que nous mangeons. Dans cette rubrique, nous parlerons de manger dans toutes ses dimensions. La nutrition et la recherche d’une alimentation équilibrée sera, bien sûr, au menu. Nous parlerons également de l’ensemble des facteurs qui contribuent à une bonne assimilation des nutriments, à une bonne digestion et à une saine élimination. Sans oublier la dimension culturelle, sociale d’un repas partagé en famille ou entre amis, avec en conséquence, la nécessité de pouvoir faire partager sa démarche de souhaiter faire évoluer son alimentation. La dimension psychologique de notre rapport à l’alimentation sera aussi abordée. Et bien sûr, des conseils sur le bien-être ne se substituent pas à un avis ou un traitement médical.


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